18 août 2023

64 - Mon trou à Clinchamp

Loin du monde dans un village de la Haute-Marne, j'ai mon trou secret.
 
Au milieu de rien, entouré de silence, d'herbes folles et de terres anonymes, je me fais oublier de tous les hommes. Au fond de ces champs de platitudes, aux abords de ces bois banals, au coeur de cette mortelle cambrousse, je m'abreuve de poésie amère, me nourris d'ombre légère et m'enivre de lumière de plomb.
 
Je regarde les vaches chier, le ciel blanchir, les nuages passer. Et laisse bleuir mon âme, lentement.
 
Je passe ainsi mes journées à observer les événements les plus anodins qui soient pour en faire un festin d'heures immortelles. Alors un flot de mélancolie me berce, un océan de rêves me submerge, et puis l'Univers entier se ramasse dans mon antre, là à mes pieds, dans ce coin perdu aussi minuscule qu'une fosse à rats. Le reste de la planète n'existe plus pour moi.
 
Mon paradis terrestre se résume à un carré d'humus, à quelques branchages, à un tapis de feuille sèches là-bas entre les cailloux du sol et le Soleil de l'éternité, quelque part à Clinchamp.
 
C'est depuis ce point zéro du Cosmos que je m'envole, mais guère plus haut que le clocher de la commune, afin de ne pas perdre de vue les pissenlits des chemins, les bouses de bovidés, la faune des fourrés, l'humilité des jours.
 
Même au sommet de mes fulgurances, je ne souhaite pas quitter cette vaste étable peuplée de bêtes et de bipèdes foulant la verdure et respirant l'azur de leur territoire étriqué aux si âpres apparences.

Elle est devenue la plus féconde source de ma plume et ma plus brûlante flamme intérieure.

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L'auteur du blog

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J'ai embrassé tous les aspects du monde, du gouffre le plus bas au sommet le plus glorieux, de l'anodin au sublime, de la bête au divin, du simple caillou à qui j'ai donné la parole jusqu'au fracas galactique que j'ai réduit au silence devant un battement d'aile. Je suis parti du microcosme pour me hisser jusqu'aux astres, sans omettre de poser mon regard à hauteur de vos boutons de chemise. J'ai exploré les vices les plus baroques autant que les vertus les moins partagées, je suis allé sonder les petits ruisseaux mentaux de mes frères humains mais aussi les fleuves nocturnes de mes chats énigmatiques. Je suis allé chercher le feu olympien à droite et à gauche, m'attardant à l'occasion sur mes doigts de pied. J'ai fait tout un fromage de vos mesquineries de mortels, une montagne de mots des fumées de ce siècle, un pâté de sable de vos trésors. L'amour, la laideur, la solitude, la vie, la mort, les rêves, l'excrément, le houblon, la pourriture, l'insignifiance, les poubelles de mon voisin, le plaisir, le vinaigre, la douleur, la mer : tout a été abordé. J'ai survolé l'Univers d'une plume grave et loufoque, limpide et fulgurante, lucide et légère, aérienne et "enclumière".