31 juillet 2023

60 - Les femmes de Clinchamp

Il n'y a pas de femmes à Clinchamp.
 
Celui qui viendra chercher la gaudriole dans cette bourgade n'y trouvera que des machines agricoles.
 
C'est qu'on ne rigole pas, là-bas !
 
En guise de galante compagnie, l'esseulé aura toujours des vaches à se mettre sous la dent. Mais aussi des grenouilles, des rats et des hiboux. Pour briser la solitude, c'est déjà mieux que rien.
 
Et puis si cela ne suffit pas, pour ne pas trop s'ennuyer il pourra encore s'entretenir avec les éternels habitués des lieux.
 
Je veux parler des morts.
 
Au moins ces derniers ne comptent pas pour du beurre, puisqu'il ne reste qu'eux à qui parler aux heures creuses des journées vides !
 
Mais pas seulement ceux qui sont au cimetière. Egalement les autres qui y ressemblent : les vivants aux mines d'enterrés.
 
Surtout les dimanches, jour de silence généralisé au village : on y confond parfois les foyers avec les tombes.
 
Pour tomber sur du jupon fin et de la dentelle affriolante dans ce clocher peuplé de bovins et de béotiens, il faut beaucoup espérer, bien rêver, ne pas être trop exigeant.
 
Il n'y a pas de filles faciles aux faux-cils dans ce trou mais il y a de vrais fossiles, pas de femelles mais une chapelle, point d'âme soeur mais des dames seules.
 
Bref, pas de coquettes mais rien que des biques.

Pour se consoler de tant de sécheresse et fertiliser ce coin perdu, enrichir son séjour, arroser ce désert, le célibataire fera de cette terre austère son ardent monastère.

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L'auteur du blog

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J'ai embrassé tous les aspects du monde, du gouffre le plus bas au sommet le plus glorieux, de l'anodin au sublime, de la bête au divin, du simple caillou à qui j'ai donné la parole jusqu'au fracas galactique que j'ai réduit au silence devant un battement d'aile. Je suis parti du microcosme pour me hisser jusqu'aux astres, sans omettre de poser mon regard à hauteur de vos boutons de chemise. J'ai exploré les vices les plus baroques autant que les vertus les moins partagées, je suis allé sonder les petits ruisseaux mentaux de mes frères humains mais aussi les fleuves nocturnes de mes chats énigmatiques. Je suis allé chercher le feu olympien à droite et à gauche, m'attardant à l'occasion sur mes doigts de pied. J'ai fait tout un fromage de vos mesquineries de mortels, une montagne de mots des fumées de ce siècle, un pâté de sable de vos trésors. L'amour, la laideur, la solitude, la vie, la mort, les rêves, l'excrément, le houblon, la pourriture, l'insignifiance, les poubelles de mon voisin, le plaisir, le vinaigre, la douleur, la mer : tout a été abordé. J'ai embrassé l'Univers d'un regard à la fois grave et loufoque, limpide et fulgurant, lucide et léger, aérien et "enclumier".