20 juin 2023

51 - Les ailes de Clinchamp

A Clinchamp, il pleut des pleurs.
 
Sur les toits autant que sur les têtes. Dans les fossés et dans les âmes tout à la fois. En mars comme en toute autre saison.
 
Des flots d'ennui s'écoulent de chaque heure qui passe. Des ombres recouvrent les jours interminables qui stagnent. Et des averses de tristesse s'abattent au fond des bois pour y former des mares de désespoir.
 
Seuls brillent les mortels dimanches, éclairés par le soleil tiède, flasque et sclérosé de l'infini torpeur.
 
Ces mortuaires éclats font pousser des rêves mornes sur ces terres sombres, émerger de leurs marécages les pensées ternes, gémir les coeurs, soupirer les pierres.
 
Et chanter les tombes.
 
Les sépultures du cimetière sont, en effet, les dernières choses vraiment inertes qui respirent le bonheur dans ce village d'enterrés !
 
Dans ce clocher aussi prostré qu'un rocher, il y coule de sempiternelles larmes.
 
En ce lieu de tous les engloutissements, le ciel ressemble aux champs, l'horizon plat est sans guérison et les matins sont semblables aux soirs.
 
Au-dessus de ce monde qui s'engloutit dans les gouffres de l'oubli, les nuages amers et sans remords sont pleins de sel. Ils répandent des sanglots dans les rigoles et de l'eau sur le sol. Rien de plus.

Le seul espoir qui tienne encore debout, là-bas dans ce pays de lourdeurs, ce sont les vaches fines et élégantes qui, avec leurs ailes de fées, apportent un peu de légèreté à cet azur de plomb et cet asile de ploucs !

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L'auteur du blog

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J'ai embrassé tous les aspects du monde, du gouffre le plus bas au sommet le plus glorieux, de l'anodin au sublime, de la bête au divin, du simple caillou à qui j'ai donné la parole jusqu'au fracas galactique que j'ai réduit au silence devant un battement d'aile. Je suis parti du microcosme pour me hisser jusqu'aux astres, sans omettre de poser mon regard à hauteur de vos boutons de chemise. J'ai exploré les vices les plus baroques autant que les vertus les moins partagées, je suis allé sonder les petits ruisseaux mentaux de mes frères humains mais aussi les fleuves nocturnes de mes chats énigmatiques. Je suis allé chercher le feu olympien à droite et à gauche, m'attardant à l'occasion sur mes doigts de pied. J'ai fait tout un fromage de vos mesquineries de mortels, une montagne de mots des fumées de ce siècle, un pâté de sable de vos trésors. L'amour, la laideur, la solitude, la vie, la mort, les rêves, l'excrément, le houblon, la pourriture, l'insignifiance, les poubelles de mon voisin, le plaisir, le vinaigre, la douleur, la mer : tout a été abordé. J'ai embrassé l'Univers d'un regard à la fois grave et loufoque, limpide et fulgurant, lucide et léger, aérien et "enclumier".