Se rendre à Clinchamp avec l'idée d'aller voir ce qui s'y passe, ce qui s'y
trouve et surtout d'y demeurer assez longuement pour y éprouver l'effroi,
l'ennui ou bien l'émerveillement, et de considérer cela comme un voyage
initiatique, c'est plonger dans un trou inconnu en même temps qu'en
soi-même.
Une exploration intérieure palpitante ou bien mortelle, mais aussi une
aventure dans les obscurités et lumières insoupçonnées d'un quotidien aussi
glorieux que misérable.
Ce village au sommet de tous les vents périmés, en retard de toutes les
modes, à l'avant-garde des pensées ancestrales, champion des vieilles torpeurs,
au premier plan des archaïsmes est la capitale mondiale des rêves et cauchemars
tout en verdure et ciels gris.
Ici le pèlerin en mal de vaches banales et d'air léthargique découvrira, en
plus de ces cadeaux à prix dérisoires, l'immense trésor des dimanches de mort,
ces jours noirs qui l'emmèneront loin, soit dans les nuages, soit dans la
bouse.
Et sous ses pieds, s'il a un peu de chance, tout en marchant il reconnaîtra
la terre promise, ignorée du reste du monde, où se posent les sabots des gens
heureux, aussi pesants que des enclumes, avec leur coeur léger, leur vie simple,
leurs regards comblés.
Dans ce clocher où l'on naît anonyme, où l'on meurt si proche des étoiles,
où l'on revient même peut-être après la tombe, les autres pensent que l'on y a
tout perdu à n'y rien faire, alors que le moindre crotteux y a tout gagné au
contraire, après y avoir passé cent ans à regarder l'azur et le cul des bovins
avec des yeux pareils aux humbles élus qui sont dans la grâce.
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