Si vous avez l'humeur d'un rat crevé, le coeur d'un corbeau lugubre ou
l'âme d'un loup solitaire, venez vous ressourcer à Clinchamp !
Dans ce repaire de tout ce qui pleure et vole, se lamente et rêve, gît et
s'enflamme, une joie spéciale jaillit de l'ombre et monte jusqu'à l'azur !
En cette terre élue mille sources de légèretés abreuveront vos têtes
ténébreuses, éclaireront vos pensées noires, changeront vos lourdeurs de plomb
en ailes d'or.
Sous ses dehors tombals, le village est en réalité le royaume des célestes
ivresses ! Là les ploucs y sont heureux sans le savoir, les vaches prennent de
la hauteur et les oiseaux se mêlent aux astres. Et les sabots de tous ces
bouseux et de toutes ces bêtes meuglantes qui cheminent vers l'ennui ou bien
tournent en rond, résonnent comme autant de cloches de cristal dans un ciel
d'espoir.
Oui, sous les habits plébéiens, derrière les fronts grossiers, au-dessus
des cornes épaisses, loin des pesanteurs horizontales, autour de ce clocher de
la Haute-Marne un miracle permanent transforme les misères de notre siècle en
pures beautés. Cette alchimie s'opère, en ce lieu précis, en vertu de la
situation idéale dans laquelle se trouve cette commune perdue. En effet, les
esprits fins constatent que de cette campagne aussi mortelle qu'un trou à
sépultures émane paradoxalement une lumière particulière.
Cette clarté proviendrait de l'essentielle sobriété de cet endroit figé
dans sa sclérose.
Ce ne sont ni les artifices ni les opulences qui confèrent leur splendeur
aux déserts, font briller les caves, embellissent les ruines, mais les plus
humbles choses, les moindres insignifiances, n'importe quelle brise de
banalité.
C'est exactement ce qui se passe dans ce microcosme champêtre
avantageusement placé entre l'étable à bovins et l'infini cosmique, comme né de
la rencontre improbable des navets et des nuages ou du mariage subtil entre les
cailloux du dimanche et la brume des jours de pluie.
Bref, en ce point propice de nulle part, renaissent les sèves mortes du
monde. Les citadins écoeurés de leur luxe, blasés de leur lustre, lassés de leur
lucre, auront de quoi s'oxygéner avec l'air des champs semés de patates et
d'étoiles.
Au contact des vérités les plus simples, tout ce qui est de marbre se fait
chair.
Là-bas, les plantes sèches redeviennent des herbes folles prêtes à fertiliser
le néant.
VOIR LA VIDEO :
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire